“Un comédien peut tricher avec ses émotions. Pas un clown” : Les secrets du métier de clown avec David Braun, metteur en scène et comédien à l’affiche du spectacle “Entendez-vous”

“Un comédien peut tricher avec ses émotions. Pas un clown” : Les secrets du métier de clown avec David Braun, metteur en scène et comédien à l’affiche du spectacle “Entendez-vous”

“Un comédien peut tricher avec ses émotions. Pas un clown” : Les secrets du métier de clown avec David Braun, metteur en scène et comédien à l’affiche du spectacle “Entendez-vous”

David Braun, comédien et metteur en scène, revient sur son parcours atypique, entre clown, cabaret et théâtre. Dans cette interview, il partage son expérience et ses conseils pour les artistes en herbe, du processus de création de son spectacle Entendez-vous à l’importance d’être authentique sur scène. Découvrez les coulisses de son travail, son approche du clown et ses réflexions sur l’écriture théâtrale. Un échange inspirant pour tous ceux qui souhaitent se lancer dans une carrière artistique durable.

Bonjour David, pourriez-vous nous parler de votre parcours de comédien ?

D.B : J’ai commencé par le clown et le cabaret. C’est très stimulant pour moi d’avoir un rapport direct avec le public. J’aime aussi écrire. J’ai créé un duo, les Beaux Parleurs, avec ma prof de chant de mon école de clown, Marie-Claude Vallez. Et comme Marie-Claude chante merveilleusement, je me suis mis à l’accordéon pour l’accompagner. Depuis, je suis un comédien tout terrain, avec ou sans accordéon, et un clown, avec ou sans nez. Comme je suis aussi passionné par la transmission, je fais beaucoup de théâtre forum dans les établissements scolaires. Je suis fidèle à plusieurs compagnies et j’ai créé la mienne, la compagnie Diva d’un Bar, pour monter mes propres textes sur scène. 

En plus de votre carrière de comédien, vous êtes également clown. Comment devient-on clown ? Existe-t-il une formation spécifique ?

D.B : Je ne sais pas comment on devient clown en général, mais dans mon cas j’étais prof de français et j’avais l’impression d’être un imposteur et de passer à côté de ma vie. C’est pas mal de se sentir imposteur pour devenir clown. J’ai fait le stage de Robin Renucci en Corse, l’ARIA. J’y ai découvert le travail du masque dans la commedia dell’arte. Ça m’a fasciné. J’y ai aussi appris que le nez rouge était le plus petit masque du monde, et que pour être clown il fallait être le plus authentique possible. J’ai suivi trois années de formation à l’école du Samovar. Ça m’a beaucoup appris, mais ce qui apprend le plus le métier c’est la confrontation avec le public. 

On vous retrouve sur la scène du Théâtre À la Folie tous les vendredis et samedis dans la pièce “Entendez-vous” que vous avez écrite. Comment l’inspiration pour cette pièce vous est-elle venue ?

D.B : Je n’en pouvais plus des mots de passe, des questionnaires de satisfaction, des voix d’ordinateur qui ont des fausses conversations avec vous au téléphone ou des vrais opérateurs qui parlent comme des robots. Sous la bienveillance affichée des formules commerciales, je sens dans tout ça quelque chose d’un peu barbare qui me fait vraiment flipper. Alors j’ai préféré en rire. J’ai imaginé douze situations, la plupart très banales, dans laquelle j’ai confronté à cette langue qui pense et parle à notre place un homme très ordinaire qui essaie simplement d’être entendu. Évidemment, chaque fois ça part en cacahuète. 

En combien de temps avez-vous écrit “Entendez-vous” ?

D.B : J’ai écrit presque d’une traite les quatre premières scènes. Je les ai testées en les lisant avec Cyrille. Ça nous a bien fait rire. J’ai senti qu’il y avait une matière à creuser. J’ai mis plusieurs mois à affiner ces premières scènes et à en écrire huit autres. Ça s’est étalé sur une année environ. 

Pour les comédiens et comédiennes qui souhaitent se lancer dans l’écriture d’une pièce, pouvez-vous nous expliquer le processus de création, de l’écriture à la mise en scène ? Vous en êtes l’auteur, et la mise en scène est confiée à Gérard Chabanier. Comment a-t-il été choisi et comment avez-vous collaboré pour faire vivre cette pièce ?

D.B : Je ne crois pas qu’il n’y ait vraiment de règles pour écrire. Mais au théâtre, il y a quand même une particularité. Le texte est voué à passer la rampe. Alors quand on écrit du théâtre, c’est essentiel d’entendre dans sa tête les mots qu’on écrit, ou encore mieux, d’entendre ce qu’on a écrit en le faisant lire par un ou plusieurs comédiens. Personnellement, je trouve aussi qu’écrire du théâtre ça consiste surtout à couper. Ce n’est pas très difficile de mettre par écrit ce qui nous passe par la tête. N’importe qui peut pisser de la copie. Ce qui demande un vrai travail par contre, c’est la mise en forme. Et dans cette mise en forme, les coupes me semblent décisives pour donner le tempo, la vitalité. Pour la mise en scène d’Entendez-Vous !, avec Cyrille on a choisi Gérard Chabanier, avec lequel on avait travaillé l’un comme l’autre, à l’ARIA justement. Gérard est un vrai artisan du rire. Il est très exigeant et il a un sens exceptionnel du burlesque et du clown. Dès qu’on s’est mis à répéter ensemble, un autre travail d’écriture s’est mis en place, cette fois au plateau, pour développer les transitions entre les scènes et le rapport entre Cyrille et moi sur la scène.   

Pouvez-vous nous présenter la pièce “Entendez-vous” ?

D.B : Entendez-Vous ! n’est pas une pièce. C’est un spectacle qui a les allures d’un cabaret. Je joue l’auteur et Cyrille joue le comédien que l’auteur a recruté pour interpréter ces douze scènes. Dès le début ça dérape entre nous. Nos conflits contaminent les scènes et les transitions. On joue une trentaine de personnages. On n’a pas de décor. Juste un rond de lumière. On mime, on bruite nous-mêmes. C’est de la satire mais c’est aussi du burlesque. C’est du clown mais ça part aussi dans la comédie musicale. On ne s’est posé aucune limite.

Vous partagez la scène avec Cyrille Andrieu-Lacu. Avez-vous réalisé un casting pour ce rôle ?

D.B : J’ai connu Cyrille pour des lectures de Bulles, une pièce que j’avais écrite. J’avais passé une annonce. Il avait hérité du rôle un peu ingrat des didascalies, et malgré ça, je trouvais qu’il leur donnait un rythme et une vie incroyables. Les années ont passé. J’ai recroisé Cyrille. Il m’a appris qu’il se lançait dans le clown. Après dix ans de Beaux Parleurs, j’avais envie d’un nouveau duo, cette fois avec un comédien homme. Cyrille était d’accord sur le principe. Plus tard, j’ai eu le déclic pour écrire les premières scènes d’Entendez-Vous ! et c’est comme ça que le spectacle est né. 

Une anecdote de casting à nous partager ?

D.B : Il y a cinq ans environ j’ai répondu à une annonce. Le metteur en scène cherchait un comédien doublé d’un très bon accordéoniste. Il fallait envoyer des vidéos. J’étais loin de me considérer comme un très bon accordéoniste, mais je me suis dit que je n’avais rien à perdre, et que de préparer la vidéo aurait au moins le mérite de me faire travailler et de me faire progresser. Je n’y croyais tellement pas que je n’étais pas été surpris de ne recevoir aucune nouvelle. Sauf que six mois plus tard, j’ai reçu un coup de téléphone du metteur en scène, Jean-Bernard Philippot, de la compagnie Nomades. Il m’a dit qu’il ne m’avait pas contacté parce qu’entre temps il avait modifié le personnage pour lequel il avait demandé les vidéos, et que mon profil ne lui correspondait plus tellement. Par contre, il avait beaucoup aimé ce que je lui avais envoyé et me proposait un rôle dans son adaptation de Germinal qu’il allait monter au pièce du Familistère de Guise, sur un plateau de plus de soixante mètre de long, avec dix-sept autres comédiens musiciens pros mais aussi près de deux cents amateurs. Cette aventure est devenue l’un de mes plus beaux souvenirs de répétitions et de représentations. 

Et lorsqu’on est clown, passe-t-on aussi des castings ? Comment se déroulent-ils dans ce cas ?

D.B : Oui bien sûr, j’ai passé des auditions pour le clown. Ce n’est pas très différent des castings de comédien, si ce n’est qu’on met sans doute plus de soi. Un comédien peut tricher avec ses émotions. Pas un clown. 

Enfin, quel conseil donneriez-vous aux membres de Casting.fr qui se lancent dans une carrière artistique ?

D.B : Être constamment vigilant. Ne jamais s’endormir dans le confort de ce qu’on sait faire. Savoir rebondir. Apprendre de ses bides. Ne pas se laisser démolir par les doutes et les mauvaises rencontres. Chercher toujours plus de plaisir sur le plateau. C’est la condition indispensable pour en donner.

Retrouvez David Braun sur la scène du théâtre À La Folie dans “Entendez-vous” du 7 mars au 7 juin tous les vendredis et samedis à 21h.

Avec : David Braun et Cyrille Andrieu-Lacu.

Mise en scène : Gérard Chabanier.

Texte : David Braun.

Lieu : À la folie Théâtre. 6 Rue de la Folie Méricourt, 75011 Paris.

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