Gabriel Marc, auteur et comédien de la pièce Jacques de Bascher
Gabriel Marc, auteur et comédien de la pièce Jacques de Bascher
Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire sur un homme de l’ombre comme Jacques de Bascher ?
GM : J’ai commencé ma scolarité en école supérieure par des études de mode parce que c’était mon plan B après des études de théâtre et qu’après mon bac, je me sentais incapable de jouer devant des gens et d’être jugé pour ça. J’avais le sentiment que cela ne serait pas mon jeu, mais moi qui serait observé et j’en étais terrifié alors que je rêvais de faire ce métier. Je fais donc 3 ans d’études de mode et en passionné d’Yves Saint Laurent je lis beaucoup de choses à son sujet et il y avait souvent quelques lignes qui évoquaient sa relation avec Jacques de Bascher. Cela m’a intrigué et j’ai tapé son nom sur Internet et le peu d’articles que je trouvais le dépeignaient comme « le diable de Paris », « l’amant machiavélique » ou des choses comme cela et je ne comprenais pas. Puis les films sur Yves Saint Laurent sont sortis et je me suis dit que le personnage de Jacques devenait intriguant. Deux biographies à son sujet ont été éditées et je me suis précipité dessus, je craignais que ce sujet m’échappe.
J’ai été touché par cet homme, fasciné par sa liberté d’esprit et de corps et son intelligence. Il était pour moi le symbole d’une époque libre qui a été stoppée brutalement par l’arrivée du sida. Je ne sais pas pour quelle raison, mais il y avait tant de choses à son sujet qui le faisaient passer pour une personne mauvaise que je voulais, sans le défendre ni minimiser ses actes, lui donner la parole pour qu’enfin il puisse s’expliquer ou du moins donner son point de vue. Alors, il s’avère que c’est mon point de vue sur sa vie a travers sa bouche mais j’espère avoir été assez fidèle, et si je ne le suis pas, n’avoir pas été trop loin de celui qui l’a pu être.
Vous êtes l’auteur et le seul comédien de cette pièce, pensez-vous qu’il est nécessaire de faire un choix entre jouer et écrire ?
GM : Je ne crois pas, pour le moment c’est une « facilité » de me donner mes propres rôles en écrivant. Maintenant, si on me demandait de faire un choix… Il y a quelques années j’aurais dit jouer sans hésiter, aujourd’hui il faudrait que je prenne le temps d’y réfléchir, jouer, écrire et réaliser, c’est créer et construire des histoires différemment, il me faudrait une vraie et longue réflexion pour pouvoir choisir.
Quel est le niveau de difficulté auquel on fait face lorsque l’on incarne une personne qui a véritablement existé ? Vous reconnaissez-vous dans ce personnage ?
GM : Ne pas trahir c’est le plus difficile parce que c’est un homme du 20e siècle, donc des personnes qui ont pu le croiser peuvent encore assister au spectacle et en même temps, la fiction nous force à mentir un peu. On raccourcit le temps, on est obligé de retirer des personnages pour que le spectateur ne se perde pas, il faut faire des choix et heureusement que ma metteure en scène Guila Braoudé était là pour trancher, parfois de façon radicale, car je ne voulais mentir sur rien mais malheureusement nous n’avons pas le choix. Ensuite, il faut trouver l’angle et encore une fois, c’est une histoire de choix, je retrace à peu près 10 ans de la vie de Jacques de Bascher et il faut condenser cela en 1h15 c’est impossible. Il faut donc sacrifier des anecdotes que j’adorais, en une phrase expliquer une situation qui se diluait sur 2 pages.
Quant à savoir si je me reconnais dans ce personnage, oui et non. J’ai avant tout eu envie de lui donner la parole, c’était vraiment mon but premier, mais je ne crois pas que je me reconnaisse en lui. Cependant, j’admire avec force sa liberté, je suis en adoration devant cette façon de concevoir la vie en la brûlant par les deux bouts.
« Jacques de Bascher » est votre première pièce de théâtre,vous avez d’abord écrit des courts-métrages, comment évaluez-vous la différence d’écriture entre les deux ?
GM : J’ai commencé par écrire « Jacques de Bascher », je suis sur ce projet depuis 2019, ce qui m’a permis la rencontre avec Guila Braoudé, ma metteure en scène qui m’a beaucoup aidé sur la construction d’un spectacle, son intrigue etc … Ensuite, entre le moment où le projet est terminé et celui où les spectateurs le voient, c’est une bataille assez longue. J’ai donc entre-temps essayé l’exercice du court métrage, je m’y suis d’ailleurs confronté après le confinement en découvrant un festival sur Instagram qui s’appelle « 1minute2court ». J’ai écrit « Jacques de Bascher » presque comme un film, je visualise les scènes, les lumières, les ambiances son etc … Pour le moment, je ne vois pas de différence dans l’écriture.
Avez-vous joué dans vos propres courts-métrages ? Racontez-nous comment ça s’est passé.
GM : Étonnamment oui dans le premier, post confinement, parce que j’étais le comédien que j’avais sous la main. C’était très particulier parce que j’avais juste un ami qui était à la caméra et moi devant, nous nous sommes chargés de tout. Ensuite, je devais monter le film, mais je suis content du résultat et nous avons eu un prix de l’image, justement au festival « 1minute2court ».
Avez-vous déjà passé des castings ? Racontez-nous une anecdote.
GM : Oui j’en ai passé, l’exercice est si angoissant je ne m’y suis pas encore fait … On nous demande d’imaginer une multitude de choses improbables en étant dans une salle sinistre, cette étape de travail est vraiment la plus particulière.
Pouvez-vous nous parler de votre formation de comédien chez “Le laboratoire de l’acteur ?”. Comment se sont passées les auditions, qu’avez-vous appris globalement pendant votre formation ?
GM : C’était une belle expérience très prenante, on donne beaucoup de nous dans les études de théâtre. Ça m’a surtout permis de rencontrer des actrices et des acteurs super avec lesquels je suis encore en contact. J’y ai appris le travail, la détermination et à comprendre l’humain.
Que souhaitez vous pour la suite de votre carrière ? Allez-vous continuer les courts-métrages ou vous concentrer sur les pièces de théâtre ?
GM : J’ai plein d’envies qui me viennent en tête, mais en bon superstitieux que je suis, je vais les garder pour moi et je les cocherais quand elles se concrétiseront. Je suis en cours d’écriture avec un co-auteur formidable, Alexis Debieuvre, quelques projets qui prendront probablement la forme de pièces ou de courts métrages. Je vais surement commencer par quelques jours de repos après les quelques mois intenses de la création de « Jacques de Bascher ».
Infos pratiques : Vous pouvez aller voir la pièce au Théâtre de la Contrescarpe à Paris 5ème les vendredis et samedis à 21h.