Stéphane Gaillard, directeur de casting : “ Il est inacceptable d’humilier… peu importe le milieu”

Pouvez-vous vous présenter à nous ? Et pourquoi prendre la parole aujourd’hui ?  

Je suis directeur de casting pour le cinéma, la télévision et aussi les plateformes depuis 27 ans. Il m’est arrivé dans ma carrière de recueillir les témoignages de jeunes artistes déboussolés par ce qui a pu leur arriver face à des recruteurs. Récemment j’ai lu un post très courageux d’un jeune garçon qui a eu le courage de dénoncer des propos homophobes durant un casting. Après avoir été choqué lorsque cet événement s’est déroulé, en rentrant chez lui il a posté sur facebook. Quelques jours plus tard, le directeur de casting s’est excusé et il a même obtenu un rôle. Que cette histoire serve d’exemple, il est temps de dire les choses. 

Qu’est ce qui vous a poussé à libérer la parole vis-à-vis des abus de pouvoir ?

J’ai toujours soutenu le mouvement #Metoo, que ce soit au sein du cinéma ou d’un autre médium artistique. On parle de choses très graves comme d’agressions sexuelles et/ou de viols mais avant d’atteindre cet extrême,  une autre réalité existe. Celle-ci est régie par les abus de pouvoir. Il y a d’ailleurs souvent un rapport de dominant/dominé dans ces milieux. Par exemple, un directeur de casting est en position de pouvoir par rapport à un jeune artiste qui est en demande. 

Selon vous, ces abus de pouvoir peuvent-ils ébranler l'estime de ces jeunes artistes ? 

Ces jeunes se retrouvent parfois dans des positions inconfortables où ils se disent “j’ai l’impression que…” sauf que lorsqu’ils ont cette impression, c’est qu’il est déjà trop tard. Il n’y a pas de hasard dans les ressentis, c’est du réel. Ce que je veux faire comprendre aujourd'hui c’est qu’il est inacceptable d'humilier, de sadiser et d’être irrespectueux en le légitimant par une stature professionnelle. J’ai malheureusement rencontré des personnes dont l’estime de soi avait été touchée. Il ne faut jamais occulter que toucher à l’estime d’un être humain est extrêmement grave et peut conduire jusqu’à la destruction de ce dernier. 

Comment faire face à ces abus ? 

Il est très compliqué pour une victime de réagir dans une situation d’abus de pouvoir car pour se protéger, le cerveau se met en état de sidération et ces jeunes ne savent plus comment réagir ni comment parler, ils sont coincés. Ce qu’il faudrait maintenant c’est qu’on en parle d’une manière plus accrue afin de faire de la prévention et éviter de genre de situations à l’avenir. 

Pensez-vous qu’il est important d'ouvrir la parole aujourd'hui ? 

Il est primordial d'accompagner la parole et la libération de la parole pour ces jeunes artistes. Les professionnel.le.s ont le devoir de dire “oui, je te crois” car ils ont une déontologie et une éthique qui ne devraient jamais leur permettre de tels actes.

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Crédit photo : Kolevski Rob.R