Rencontrez Laurent Rochut, l’épaule sur laquelle peuvent se reposer les compagnies de théâtre avignonnaises.
Du 24/05/2022
Rencontrez Laurent Rochut, l’épaule sur laquelle peuvent se reposer les compagnies de théâtre avignonnaises.
Bonjour Laurent Rochut !
Comment vous est venue l’idée de créer La Factory ?
En arrivant à Avignon en 2012, j’ai été frappé de voir toutes ces salles de spectacles, véritables ruches en juillet, fermées 11 mois sur 12. J’avais une compagnie de théâtre avec laquelle j’ai beaucoup souffert de l’absence de lieux dignes de ce nom pour créer un spectacle dans de bonnes conditions. Il m’a semblé que la meilleure façon de lutter contre ce gâchis de ressources, c’était de montrer l’exemple. En 7 ans j’ai ouvert 3 salles avec, dès 2015, le souci de les mettre à disposition des compagnies et de construire un accompagnement de leurs créations à l’année. Depuis, nous accueillons tous les ans plus de 30 compagnies pour 40 semaines de résidences et dans toutes les disciplines. Et les compagnies viennent de toute la France. C’est la preuve que ce besoin de lieux pour travailler se fait sentir partout et cruellement.
Quelles sont vos tâches principales en tant que directeur de cette structure ?
Créer l’infrastructure technique et administrative qui permet aux cies qui viennent en résidence chez nous de n’avoir pas d’autre sujet que leur création quand elles passent nos portes. Le temps qui me reste, je le passe sur la route à aller au-devant des créations futures, à voir des spectacles ou à transporter du matériel…
Pourquoi avoir choisi la voie de l’économie et de la finance si vous aimiez l’art et plus précisément le théâtre depuis toujours ?
Tout petit déjà j’ai pensé qu’il ne fallait pas faire confiance aux adultes et cela a été un très grand moteur de réussite scolaire chez moi. Je voulais en savoir plus qu’eux pour qu’ils ne puissent pas me rouler. Après le bac, quand j’entendais parler les adultes qui gouvernent le monde, ils parlaient d’économie, de politique et de finance avec des arguments d’autorité. J’ai pensé que c’était les sujets sur lesquels il fallait se document pour ne pas se faire enfariner… j’ai toujours eu beaucoup de mal avec l’obéissance, encore plus quand elle devrait être aveugle.
Qu’est ce qui vous a finalement donné envie de poursuivre votre passion jusqu’à écrire des pièces de théâtre, lancer un festival et même créer votre propre compagnie ?
Je faisais déjà ça avant d’obtenir un magistère d’économie industrielle et un DEA de Finance internationale. En même temps que mes études, j’ai participé de 1989 à 1991 à une belle aventure de presse. J’ai fait partie de l’équipe de l’Idiot International aux côtés de Jean-Edern Hallier, Patrick Besson, Christian Laborde, Gébé, Wolinski, Cabu… je suis tombé dans la marmite de la littérature tout petit. Et pour les mêmes raisons. Comprendre le monde sensible par moi même et le nommer avec une voix qui me soit propre. J’ai publié un roman aux éditions Phébus mais très vite c’est le théâtre qui m’attirait. Le côté embarcation des flibustiers. Écrire un roman c’est une traversée en solitaire. J’avais besoin de fraterniser, de travailler en bande. Une association de bienfaiteurs en quelque sorte.
Qu’est ce qui vous a artistiquement séduit à Avignon par rapport à Paris pour que vous vous installiez là bas avec La Factory ?
Il ne faut pas se mentir. Le Festival Off permet à lui-seul de faire vivre une structure de spectacle en toute autonomie sans avoir besoin de quémander de l’argent public. Je suis le dirigeant de la structure qui a fait l’acquisition des salles et qui accueille l’association LA FACTORY. L’activité du Festival permet à cette entreprise d’être pérenne et de me rémunérer. De septembre à juin, je peux permettre à LA FACTORY de fonctionner sans logique de rentabilité. Sans le Off, ce ne serait pas possible. Aujourd’hui l’association est conventionnée par la ville d’Avignon et soutenue par le département et tout retourne aux salaires de mon équipe et à l’accueil des compagnies.
Comment très concrètement accompagnez-vous les compagnies émergentes au sein de La Factory ?
Pendant l’année, la salle Tomasi leur est entièrement dédiée. 5 cies ont un statut d’artiste associé de LA FACTORY. Cela leur permet d’utiliser la salle comme ils le souhaitent, avec un agenda partagé. D’y laisser leur matériel, de répéter ou simplement chercher. Nous sommes aussi à leur écoute et leur donnons des informations ou des conseils pour accompagner leur professionnalisation. Comment se structurer, chercher des ressources de production ou des subventions, comment organiser sa diffusion…
Quel conseil donneriez-vous aux membres de casting.fr qui souhaiteraient, comme vous, apporter leur pierre à l’édifice et lancer une compagnie et/ou développer une institution artistique comme ce que vous faites avec La Factory.
D’avoir eu une autre vie avant, ou plusieurs. On pense que ces métiers sont faits pour trouver de la notoriété ou de la réussite, mais ils nécessitent surtout la capacité de s’oublier. Il faut être en règle avec son égo et ne pas avoir trop de choses à se prouver. Ça permet de voyager plus serein.
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